mercredi 28 mars 2012

Garochage #7 (à propos de moi vs le monde)


J’aurais pu me taire
tout laisser tomber
voir enfin fleurir
aux bouts de mes nerfs
ce gros bouquet tendu
de portes battantes

J’aurais pu m’éclore
tout quitter
m’enliser dans le décor
avec le monde à mes pieds
comme un caillou dans mon soulier

J’aurais pu me taire
ne plus rester
m’improviser fantôme
voir le monde entier
comme un film
sans moi dedans

Je vais tout simplement partir
dans un grand rire
toucher ce pôle
qui me fait tant rêver


Un grand pôle 
tout blanc
jouant très bien son rôle
de bout du monde


Qu’il soit du nord ou du sud
cela m’importe peu
pourvu qu’il me soit
vaste enclos de solitude
où faire aller mes pieds
clopin-clopant
dans son épais crémage
de tarte à la crème
bien écrasée
dans la gueule
du monde entier

Christian Girard (c) 2012

mercredi 21 mars 2012

Limbes


Elle a bu les désinfectants du cœur
les flacons les moins chers en ville
et s’est mise à rêver 

parmi les carcasses
de ses chiens morts  






 Christian Girard (c) 2012

jeudi 15 mars 2012

OUVRIR LES YEUX (Julien Torma)

Écrire quand on n'y voit plus
manger du pain chaud
appeler un ami du bout de la rue
sortir du cinéma à midi
être surpris au bord de la mer par une éclispe
recueillir la pluie
sur d'immenses feuilles de buvard rose
allumer des feux le long des routes
& surtout
oublier ses lettres
oublier son nom
oublier comme on sourit en pensant à autre chose.

Julien Torma (c) 1925 
Le Grand Troche
Éditions Allia
1988

lundi 5 mars 2012

Ode à la nuit

C'est la nuit parfaite
la nuit la plus longue
la nuit des temps
la nuit américaine
la nuit des nuits
la nuit du meurtre
la nuit des vidéos
la nuit des longs couteaux
où tous les chats
sont gris

la nuit où je dors
la nuit où je mens
la nuit des morts
vivants

Christian Girard (c) 2012

dimanche 4 mars 2012

My Father and I and Billy Two Rivers (poème de Paul Muldoon)


Our favoured wrestler, the Mohawk Indian.

We would sit in the local barber shop-
'Could he not afford a decent haircut?'-
to watch him suffer the slings and arrows
of a giant Negro who fought dirty.

The Negro's breath-taking crotch-hold and slam
left all of us out for a count of ten.

The barber knew the whole thing was a sham.

Next week would see Billy back on his feet
for one of his withering Tomahawk Chops
to a Britisher's craw,


                            dusting him out
of the ring and into the wide-mouthed crowd
like a bal of tea at the Boston Tea Party.

(c) Paul Muldoon, Quoof, 1983

2 aventures de Konnar le barbant oubliées et retrouvées et à peine modifiées (pas finies)

1.

Konnar le barbant
a la nette impression
que son libre-arbitre
est vendu à l'adversaire.

Alors, il le hue
à s'en cracher les poumons
tout en sachant bien
qu'il ne peut en rien
influencer le résultat final.

Mais,
reconnaît-il,
cela fait du bien
sur le coup.


2.

Konnar le barbant
dans son lit sur le dos
ouvre largement ses mains
en direction du plafond,
les doigts tendus tout raides
qu'il regarde fixement.

Il voit ses avant-bras
du coude aux ongles
se transformer
en palmiers.

Parfois
il hallucine
Robinson Crusoë
s'appuyant le dos
sur l'un d'eux
et relisant
avec angoisse
un avis d'expulsion.

Christian Girard (c) 2006




jeudi 1 mars 2012

Dans le vent


Tous les jours
me casser la tête
qui s’effrite et neige
petits flocons d’os

Christian Girard (c) 2012