dimanche 22 mars 2015


Je cherche à vomir des mots
sans confessions
des mots nus
comme un oiseau
quittant à jamais
le perchoir de ma langue
pour s’aller fondre au bleu du ciel
ce bleu de sainte-vierge
ce bleu de gâteau
ce bleu enfin
de larmes et d’eau
dans les dessins d’enfants.

Chercher de l’or,
la gloire,
des poux,
la bête noire?
Chercher le Graal,
mon nonosse,
le trouble?
rien à voir
rien à faire
je cherche à vomir des mots
comme un volcan crache un ciel,
un ballet de feu nu, de phénix orangés
balayant de leurs ailes enragées
des siècles et des siècles
de maisons en rangées.

Christian Girard (c) 2015

mercredi 21 janvier 2015

Cracher n'a rien de nouveau
Laissons le temps faire son œuvre
Et rêvons de corbeaux magnifiques
Pendant que nous n'avons rien à dire

Christian Girard (c) 2015

jeudi 31 juillet 2014

LES ILLUSIONS TERNIES


Je renifle à l’occasion
la bonne occasion :
je mets tout dans le même tas -
le rêve, l’envie de mourir,
l’humour, l’envie de disparaître,
le désir d’argent, la mélancolie,
l’amour, l’abattoir, etc... -
je secoue le tas d’un grand coup de pied,
je fais des pieds, des mains,
je dresse mes beaux grands chevaux,
je grimpe dans tous les rideaux
et je salue au loin la terre promise
qui ne m’apparaîtra sûrement jamais.

Christian Girard (c) 2014


dimanche 25 mai 2014

DE QUOI AVOIR PEUR


On apprend jeune à crier au meurtre
les délices n’ont pas d’emprise sur nous
et nous ne calculons pas encore dans le menu
les défaites les plus creuses

les morts s’enchaînent pourtant
bloquant les portes
et laissant le téléphone sonner
avec une indifférence imperturbable

il faudra souvent revoir la leçon
la réviser dans tous les journaux
ajuster sa voix, trier les mots
parmi les cadavres
et les indulgences

Christian Girard (c) 2014

samedi 26 avril 2014

L' IRRIGATION DES SOLITUDES



J'aspire à me nourrir de voix tenues pour mortes. C'est un aliment comme un autre quand on veut se tenir debout parmi les désastres. Mes kilos de viande en réclament. Mon sang muet s'agite à leur approche et le vent sur ma peau soudain se fait plus lourd, comme un cuir nouveau découpé sur le dos d'une race éteinte.

Christian Girard (c) 2014

samedi 1 mars 2014

APPELER LES MONSTRES



Je suis né d’une indigestion des limbes
à deux pas d’une usine à brouillard
où ma langue mourut tout au fond d’un cri
poussée par l’étranglement du paysage

Christian Girard (c) 2014

dimanche 9 février 2014

MA FATIGUE


Je passe beaucoup de temps avec ma fatigue. Elle est peu bavarde, ma fatigue. Je la connais très peu. Mais son crâne invite à la rêverie désespérée. Son crâne est un globe terrestre envahi par des centaines d’épingles piquées à différents endroits.

Ma fatigue prend la pose d’un esprit torturé, ses mains contiennent son front comme pour en éviter l’effondrement sur la table, dans son assiette ou sur son napperon graisseux. Et ses yeux se noient dans l’Atlantique Nord jusqu’à ce que je lui fasse tourner sa caboche toute ronde, fixée sur son corps d’épouvantail que plus rien ne semble secouer.

Et ses yeux se referment, saisis par le tournis d’un aussi brusque tour du globe. Et c’est alors des déluges de larmes qui inondent le monde.

Ma fatigue ouvre alors ses yeux rougis de pleurs et de veilles sans fin qui me regardent, pleins de pitié, m’amuser distraitement avec sa caboche.

Ma fatigue est muselée quelque part dans un coin du tiers-monde et ses bras font des gestes lents de marée noire ensevelis sous les manches d’un vieux manteau de quêteux. Je sais qu’elle essaie de me dire d’arrêter de lui faire tourner la tête et d’aller me rasseoir calmement à ma place.

Et nous passons ainsi de longues heures, ma fatigue et moi, assis à ma table, en silence, à répéter ce petit manège, cette envie de tuer le temps.

Christian Girard(c)2014