mardi 28 septembre 2010

Ce n'est qu'en ambulance
qu'on me verra
un jour
me rendre
à l'évidence

Christian Girard (c) 2010

mercredi 15 septembre 2010

Les paroles s'envolent et font sur nos têtes.
Christian Girard (c) 2010

mardi 14 septembre 2010

Et le Verbe s'est fait chier.

Christian Girard (c) 2010

dimanche 12 septembre 2010

MAGNIFIQUE LOSER

pour L. Cohen

Il arrive que mes bulles de gomme
Se mettent à sonner comme du Mozart
Surtout quand je sens que ce soir
Tout va pour le mieux

Et qu’à défaut d’être beau
Visage brûlé par l’amour
J’ai au moins la musique
Qui me donne le swing
Pour déambuler
Sur Boogie Street
Le coeur allège

Et pour tenter ma chance
Dans ce maudit métier
Qu’on appelle
Liberté

Quitte à me perdre

Magnifiquement

Christian Girard © 2010

samedi 11 septembre 2010

MA LANGUE EST MÛRE POUR LE SILENCE

Nue
Comme un rocher
En forme
De cri

Saumon fourbu
Qui détalait
À toute allure
Comme à rebours
Dans l’eau de rose
De mes cauchemars

Cheval sauvage
Tout fatigué
Que je chevauche
À travers siècles
Et continents

J’ai mis des vies
À m’arracher
Tous ces labours
Ces battements de cœur
Battant mes flancs
Comme un mot bat
Ses parenthèses

Et le silence a mis des ailes
À vous pétrir tous les instants

Christian Girard (c) 2006

lundi 6 septembre 2010

Drinking Song (Jim Harrison)

I want to die in the saddle. An enemy of the civilization
I want to walk around in the woods, fish and drink.

I'm going to be a child about it and I can't help it, I
was born this way and it makes me very happy to fish and drink.

I left when it was still and walked on the path to
the river, the Yellow Dog, where I spent the day fishing and drinking.

After she left me and I quit my job and wept for a year
and all my poems were born dead, I decided I would only fish and drink.

Water will never leave earth and whiskey is good for the brain.
What else am I supposed to do in these last days but fish and drink?

In the river was a trout, and I was on the bank, my
heart in my chest, clouds above, she was in NY forever and I, fishing and drinking.

Jim Harrison, Outlyer and Ghazals, 1998

vendredi 3 septembre 2010

Il fait froid dehors...-Mon enfant nu sur des gars laids


Il fait froid dehors, le café se boit très lentement
Rock-détente mur à mur
Question à soi-même : “et si tu n’existais pas?…”

Le temps passe en rasant les murs comme un fou
Exténué de tourner en rond avec les gestes mécaniques
D’une colère blasée en pénitence au fond d’un trou

Les serveuses vont et viennent avec des pas 
Évoquant d’éléphantesques ballerines
Qui se dandinent parmi les tables, les chaises
Et sous les néons trop lumineux de ce snack-bar

 Leurs sourires sont arqués
Comme des arcs fatigués           
Aux flèches émoussées
Par des mercis forcés

Mon reflet dégouline
Sur la boîte à Napkins
Tandis que je bois mon café beige
Éberlué, statufié de mariner ainsi
Dans cette sauce commune
Ce quotidien rempli de tortures
Lentes
Et insidieuses

Je voudrais m’intéresser
Aux Serres chaudes
De Maurice Maeterlinck
Mais ce qui rôde
Autour
C’est toujours
Et encore
Du 107,5
Dégoulinant
Du plafond
Comme un torrent de guimauves
Fondues sur ma tête

Ça s’infiltre en moi
Et ça gicle de partout
Tous ces bouts de vers que j’arrache
À des chansons qui s’étiolent
Et se font cadavres exquis
Et déambulent dans mon esprit
Comme une armada
De zombies fatigués
Dont les corps rejettent
En pelures frippées
De nouveaux vers
Que je m’empresse
D’étriper

Des vers vidés de leur substance initiale
Qui par la magie malade
Des homophonies
Et des calembours
S’incarnent autrement
Et diffusent des images inédites
Dans mon cinérama intérieur
Et qui n’auraient pu naître
Sans le concours de cette même magie
Dont la source semble émanée d’un drôle de sorcier
Un chamane hystérique
Et masqué
Ostensiblement
D’une gueule de bois en plomb
Gossée par Monsieur Parkinson
Lui-même

C’est alors que,
Emporté par la marée grotesque
De ce délire,
J’oublie
La café beige
Que j’étais à boire
Le snack-bar
Et ces éléphantesques ballerines
Qui en sont les fines fleurs
Maeterlinck
107,5
Et m’enfonce avec élégance
Dans la fange inconsciente
Exprimée de la substance même
De cette logorrhée
Que je me mets à retranscrire
Parmi les autres clients
Acculés à leurs chaises
Comme des paquets de linges sales
Dans une chambre en désordre

Et cette marée
Se mélange
À mon reflet qui toujours dégouline
Sur la boîte à Napkins
Et m’emporte
En drainant dans sa course
Un vers de Francis Cabrel
Et me dépose au seuil
De quelque plage
Longeant la Manche
Où se déroule une scène
Dont voici le récit….

…Mon enfant nu sur des gars laids

Mon enfant nu
C’est Bécassine à poil
Avec seulement sa capine
Couchée
Sur un monticule
De gars laids
De Marines
De Canadiens-Français
De cadavres défigurés par la guerre
Sur quelque plage bretonne
Ou normande
On ne sait plus
Exactement où
Vu la tournure des événements
Des bombes, des gaz, des guns
Qui sont passés par là

Tout le sol n’est que galets couverts
De vomi, de sang, de boyaux
Une assiette où vont choir les restants
D’un étripage sans bon sens
Et Bécassine est couchée
Dans les pâmes
Et se roule la bille
Et ses yeux se révulsent
Dans un décor qu’on a défiguré itou

Bécassine exhibée
En cerise érotique
Sur le sundae de la mort
Brutale et foudroyante
Enveloppée par la brume épaisse
Du combat terminé
Opaque et grise et noire
Dans une ambiance
De soleil ravalé
Qui aspire en lui-même
Sa propre lumière
Sa propre chaleur
Et se terre dans le ciel
Et ne pardonne pas
À ceux qui l’ont offensé

La grassouillette ménagère
La Bretonne soubrette
Adore âprement cet état
Se broutant, se têtant, se râclant
Dans les relents fétides
De la mort incurable
Et ses instruments de ménage
Sa moppe et sa chaudière
Et ses guenilles et ses torchons
Sont éparpillés tout autour
Du monticule délabré
De bras et de jambes et de têtes et de troncs
Amoncellés, épars

Elle adore les chapeaux ronds
Des soldats Canadiens
Autant que leur accent désuet
Désolé, démembré
De fauve improbable et blessé
Leur misère noire à couteaux tirés
Qui se niche en eux
Et les dévore

Elle adore l’exhalaison
De ces âmes
Qui tournoient tout autour d’elle
Dans un élan qui rappelle
La corneille aveugle
Et la volaille de Dieu
Toutes entremêlées
Dans un ciel d’apocalypse
Déclinant

Elle trône ainsi
En convulsions
En contorsions inouïes
Sur la pyramide à steaks
Ratatinés comme des citrons pressés
D’en finir au plus sacrant
Et qui jettent quantité de sang
En petits fleuves
Sur la plage en galets
Comme un arbre exhumé
cracherait desespérément
ses racines sur un sol
Qui le rejette

C’est alors une ambiance
De mort de Dieu
Qui s’installe
Et dans le ciel le soleil a l’air
D’un Sacré-Coeur pourrissant
Et jutant sur la terre

Tout jute et Bécassine
N’est pas en reste
Et ça gicle
Comme un diamant tombé d’un coffret
Depuis son corps jusqu’au tas de morts

Le ciel la prend dans ses filets
Comme un poisson nerveux
Qui s’éléve et volette
Lentement lentement
Ses mains partout sur son corps nu
La capine agitée par le vent
Comme une soeur volante
Sur un ex voto
Pornographique

On entend le choeur des vagues
Maugréer des clapotis minables
Au cours de cette ascension
De Bécassine imbibée
De son propre plaisir
Et disparaissant lentement
Dans un ciel qui se vide
Et laisse la place
À la nuit qui tombe
Froide et lente
Comme une guillotine
Au ralenti
Christian Girard (c) 2008

jeudi 2 septembre 2010

On s'en sort pas

On ne sent plus que des chimères
Qui nous courbent le dos
Nous racontent les rumeurs
D’un autre tantôt
Quand nos coeurs pendaient
Comme des leurres
Dans les cages
De nos corps

Nous dévalons
À travers les embuscades
Vers les treillis de nos angoisses
Où séchent nos mille morts
Anonymes

L’éclat du jour n’est pour nous
Qu’un sac d’or qui éclate
Au-dessus de l’égout
Du temps

Et la nuit s’étire dans nos matins
Comme une autoroute
Au milieu de nulle part
Et qui nous emporte
De loin en loin
Dans la vague obscurité de nos silences

Silhouettes et mots qu’on effleure
Dans l’aveuglement partiel
De tous nos désirs
Insoutenables 
Christian Girard (c) 2008